Un pont en pierre du XXIe siècle fait école
Ingénieurs et chercheurs ont profité de la construction inédite du pont en pierre de Chaldecoste, en Lozère, pour analyser son cycle de vie et améliorer la modélisation de ce type de structure.
La réhabilitation d’un vieux pont routier en pierre est une opération courante. La construction d’un ouvrage neuf est, elle, inédite : « Le pont en pierre de Chaldecoste est le premier pont routier en pierre construit en France depuis les années 1950 », explique Yannick Tardivel, du Centre des techniques d’ouvrages d’art du Sétra. Il est situé, dans le Parc national des Cévennes, sur une route communale de Saint-Andéol-de-Clerguemort (Lozère). Son emplacement était occupé jusqu’en 2008 par une simple buse métallique remblayée, qu’une crue a emportée. « Le maire souhaitait la remplacer par un ouvrage traditionnel, qui respecterait l’architecture vernaculaire », poursuit Yannick Tardivel. Soit une structure en pierres de schiste locales, maçonnées par un mortier de chaux et formant un arc plein cintre de 6 m d’ouverture, assez large pour contenir les crues. La construction de l’ouvrage a respecté la tradition puisqu’elle a été réalisée par un groupement de quatre artisans locaux de l’association des Artisans bâtisseurs en pierre sèche (ABPS). Pour autant, le pont a bénéficié de l’expertise de l’ingénierie moderne du Sétra et de l’Ifsttar, qui ont aidé le maire à mener le projet jusqu’à son terme.
Un faible impact environnemental
« Suivre ce projet unique nous permettait d’acquérir un précieux retour d’expérience, explique Anne-Sophie Colas, du département Structures et ouvrages d’art de l’Ifsttar. Nous avons pu réaliser l’analyse du cycle de vie (ACV) de l’ouvrage et, avec l’Ecole centrale de Lyon et l’Ecole nationale des travaux publics de l’Etat, modéliser le comportement du pont durant sa construction. » Les conclusions, intégrées dans le projet de recherche collaboratif Pedra piloté par l’Ecole centrale de Lyon, sont instructives. « L’ACV nous a révélé que l’impact environnemental global de ce pont était inférieur de 20 % à celui d’un pont voûte béton équivalent, note Anne-Sophie Colas. Economiquement, l’ouvrage qui fait appel à des matériaux et des compétences locaux est équivalent à la solution béton. » Côté modélisation, le temps fort du chantier reste la mesure du déplacement de la voûte lors du décintrement de l’ouvrage. « La clé de voûte s’est affaissée de moins d’un millimètre », se souvient Yannick Tardivel. Grâce aux mesures réalisées à Chaldecoste, le dimensionnement des ponts en pierre sera optimisé, l’objectif étant de réintégrer ces ouvrages robustes et durables dans le catalogue des conceptions contemporaines.
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Source : Le Moniteur