Non au contournement de Beynac !
Patrimoine-Environnement vous invitera à l’automne à venir réfléchir à la valeur constitutionnelle du patrimoine à l’occasion des Journées Juridiques du Patrimoine.
En attendant il n’est pas tendancieux de constater que la loi relative à la liberté de la création, à l’architecture et au patrimoine pour ce qui est de la Culture, et les lois Grenelle pour ce qui est du ministère héritier de tous ceux en charge de l’environnement, ont confirmé avec force qu’il appartient à l’État et à ses représentants de veiller à la protection et a la conservation de ceux-ci, dans la ligne des grandes lois de 1913 s’agissant du Patrimoine et de 1930 s’agissant des paysages .
Ce pouvoir quasi régalien n’est pas fait pour manifester la défiance d’un souverain à l’égard des élus locaux, qui pour la plupart sont les protecteurs des paysages et de l’environnement sur le territoire qu’ils ont en charge.
Mais il est là pour empêcher que, soit par fraude, soit tout simplement par iconoclastie, quelques élus détruisent de manière parfois irréversible un bien qu’ils ont reçu pour mission de transmettre aux générations futures.
Tel est le cas de la vallée de la Dordogne à Beynac. Comme nous l’avons déjà dit ici, le président du Conseil départemental de la Dordogne, Germinal Peiro, est en train de détruire l’un des plus beaux paysages de notre pays en construisant une infrastructure routière de grande ampleur comprenant deux ponts en béton disproportionnés, un tunnel, des rond points au pied de plusieurs châteaux, dominant la vallée.
Ce projet met à mal la reconnaissance par l’Unesco du Bassin de la Dordogne structurée autour de la rivière et de de son réseau hydrographique comme « réserve de biosphère » dont la fonction première est la conservation de la biodiversité. Cela implique la protection des écosystèmes et des espèces que la rivière abrite. Ce projet routier vient donc à l’encontre du respect de la diversité biologique et culturelle sur le territoire en détruisant tout sur son passage : faune et flore locale, forêt, zone humide, ripisylve, maisons en pierre, berges de la Dordogne…
Force est de constater que l’État, qui avait pourtant tous les pouvoirs pour arrêter ce scandale a laissé la préfète de la Dordogne signer un arrêté autorisant cette construction. La ministre de la Culture a envoyé une mission d’inspection ; Nicolas Hulot a dépêché des membres du Conseil national du développement durable, ces inspecteurs de haut rang sont rentrés à Paris et il ne s’est rien passé.
L’impression est celle de néant juridique : du cabinet des ministres intéressés, jusqu’à celui du Premier ministre, de l’Unesco dont le silence est assourdissant à la juridiction administrative qui valide tout, des élus locaux tétanisés par les risques que feraient courir à leurs territoires une rébellion à l’encontre de la puissance départementale, rien n’y fait.
Le dernier épisode est la découverte d’un élément archéologique non négligeable qui partout ailleurs aurait arrêté les travaux mais celui-ci sera détruit, comme le reste, avec la bénédiction adéquate de services de l’État.
Que faire donc en cette occurrence aussi déprimante que désolante ? Pourquoi valider un ouvrage aussi inutile que dispendieux, depuis que des travaux à Beynac ont organisé la traversée du bourg dans de bonnes conditions ?
Les personnalités qui tentent encore de s’opposer à ce scandale ne sont pas celle que l’on trouve habituellement aux cotés des présidents des associations reconnues d’utilité publique dans la famille patrimoniale, qui bien sûr répondent présents tous les sept.
Il s’agit de l’infatigable Stéphane Bern, du grand photographe Yann Arthus Bertrand, d’Allain Bougrain-Dubourg président de la LPO, de Noël Mamère, du comédien et humoriste aimé des Français Franck Dubosc, et de bien d’autres.
Avec nous, ils demandent aux plus hautes autorités de l’État de faire application de leurs récents discours sur la protection de l’identité à l’Élysée, sur celle de la Biodiversité,
Par trois fois, depuis vingt cinq ans la population a été consultée par enquête publique sur ce projet. Par trois fois elle l’a massivement rejetée. Ce samedi 18 août elle sera rassemblée à Beynac avec les défenseurs du patrimoine pour exiger que sa volonté soit respectée.
Rien n’est impossible puisque seuls des travaux préparatoires ont été faits sur le chantier !
Alain de la Bretesche, président de Patrimoine-Environnement