Le quartier Antigone, et son architecture néo-classique à Montpellier.
Au détour d’une promenade dans le centre de Montpellier, la capitale du Languedoc-Roussillon, impossible de passer à côté de l’ensemble architectural monumental signé Ricardo Bofill, qui s’est éteint ce 14 janvier à l’âge de 82 ans. C’est ainsi l’occasion de se replonger dans la genèse de ce quartier du sud-est du centre-ville de l’Ecusson. Bien loin du modèle d’architecture moderne totalement destructrice des paysages, il montre ici qu’il est encore possible de construire de manière belle et durable.
Ricardo Bofill, d’origine Catalane de Barcelone, étudie l’architecture dans sa ville natale, mais est très vite exclu pour militantisme anti-franquiste. Il continue alors son apprentissage à Genève. Bien que considéré comme un architecte post-moderniste, Bofill (connu notamment pour la place de Catalogne à Paris, et ses célèbres Espaces Abraxas à Noisy-Le-Grand en Seine-Saint-Denis) puise son inspiration dans la culture classique, une influence gréco-latine , qui peut prendre sens dans une ville du bassin méditerranéen. L’architecte jouera un rôle décisif dans la transformation architecturale de la métropole Montpelliéraine.
Genèse d’un quartier néoclassique
À la fin des années 70, Georges Frêche, alors maire de Montpellier et son adjoint, le géographe Raymond Dugrand, lancent une politique de dynamisation du territoire, qui aura un impact considérable sur la croissance démographique de la ville. Amoureux de la culture gréco-latine, c’est très naturellement qu’il se tourne vers Ricardo Bofill pour réaliser un projet d’envergure.
Sur un vaste terrain appartenant à l’armée et traversé par le fleuve Lez, trente-six hectares de constructions néoclassiques apparaissent. Le but principal du quartier est la construction des logements sociaux, en offrant un cadre exceptionnel et une architecture monumentale.
Le projet commence en 1980, et les premières réalisations voient le jour dès 1982 ( Place du Nombre d’Or ; 1982 , 1ers logements sociaux ;1984 , Place Millénaire ; 1985 , place Thessalie 1988). Les travaux s’étalent sur une vingtaine d’années, pour finalement s’achever en 2000 avec l’arrivée du tramway dans le quartier.
Des inspirations classique et gréco-latine
Les rues piétonnes d’Antigone, créent un quartier où il fait bon s’y promener, traversé par le fleuve du Lez. Le quartier s’étend du centre commercial du Polygone (dont la façade est inspirée par les célèbres jardins suspendus de Babylone), jusqu’au fleuve du Lez, créant une perspective d’environ neuf cents mètres.
Le quartier est pensé à la manière d’une cité grecque en méditerranée, les places publiques sont aménagées comme des Agoras pour créer un espace où les habitants et les habitantes peuvent se retrouver. En se baladant, il est fréquent tomber nez à nez avec des copies de célèbres sculptures gréco-romaine, telles que la Vénus d’Arles, Diane à la Biche ou encore la Victoire de Samothrace.
D’ailleurs, le nom des places n’est pas sans être symbolique : La place du Nombre d’or, la place du Millénaire, la place Thessalie : les noms eux même sont des références historiques et mythologiques. Le plan de la place du Millénaire, rappelle l’envergure du Cirque Maxime de Rome, utilisé jadis pour les courses de chars.
Le nom du quartier lui-même fait référence : bien qu’il signifie étymologiquement « en opposition à » ; par sa posture dos au Polygone, il fait tout de même référence symboliquement à la tragédie grecque.
Appelé parfois les Champs-Elysées Montpelliérains, ce quartier est un bel exemple d’architecture contemporaine remarquable (labellisé d’ailleurs à ce titre en 2018 par la commission régionale du patrimoine et de l’architecture).
Romane Borrell
Chargée de communication – Fédération Patrimoine-Environnement