Quel vent souffle sur les Yvelines ?
Saint-Germain-en-laye, Bougival, Louveciennes, Viroflay… On croirait presque lire un bulletin de la Grande Armée relatant les défaites de la campagne de France avant les adieux de Fontainebleau.
Il ne s’agit aujourd’hui que de défaites patrimoniales. Des protections qui sautent, des institutions qui ne fonctionnent pas et des arbitrages locaux qui vont souvent dans le même sens. Il n’y a pas mort d’homme, mais seulement des bâtiments et des paysages que l’on ne reverra plus, ainsi que des associations, prêtes à déposer sous la pile de draps au fond de l’armoire non pas des armes, car elles n’en possèdent guère, mais leur enthousiasme, leur goût pour l’action positive et pour l’union.
Et pourtant, quel département patrimonial que les Yvelines : c’est Versailles, Saint-Germain, mais aussi 486 protections au titre des Monuments historiques dont 162 concernent des classements, deux Secteurs Sauvegardés et plusieurs ZPPAUP appelés à devenir des sites patrimoniaux remarquables. Je ne compte plus les labels de la fondation du patrimoine et les inscriptions dans les PLU.
Les habitants des Yvelines seraient-ils lassés de leur patrimoine ? Voudraient-ils laisser couler la Seine à Bougival en faisant fi de la colline des impressionnistes ? Si j’en juge par toutes les associations locales qui se battent et que nous soutenons, je n’en crois pas un mot. Fort de constater que l’on entre « en patrimoine » parce que l’on est contre un projet, mais au fur et à mesure, et c’est qui nous passionne, l’on devient « pour quelque chose », ainsi on se rapproche de la majorité des élus, sauf quelques rares qui ont laissé leur culture au vestiaire de l’hôtel de Ville avant d’entrer dans la salle du conseil.
Malgré un avis très clair de la commission nationale des Monuments historiques, certains voudraient abimer irrémédiablement la perspective dessinée par Le Nôtre entre le Château où est né Louis XIV et l’entrée de la Maison de la Légion d’Honneur des loges pour laisser passer un tram–train dénommé « la virgule de Saint Cyr ».
Les luttes et les interrogations se multiplient à Saint-Germain, la municipalité souhaite au milieu du Secteur Sauvegardé modifier le règlement pour permettre la construction en hauteur au risque de défigurer le quartier.
De même, à quelques kilomètres, la Machine de Marly est menacée. Construite à la fin du XVIIe siècle, son histoire est indissociable de celle de Versailles. Cette usine, rêvée par le Roi-Soleil, prélève les eaux de la Seine pour alimenter, par un réseau d’aqueduc, les fontaines du château et ainsi éblouir le monde.
L’ensemble de Marly commence à se faire grignoter par des projets autour de la maison dite du « contrôleur de la Machine ». En mai 2015, par voie d’un PLU simplifié, la Mairie de Bougival a déclassé le terrain boisé derrière l’édifice afin de construire un projet domiciliaire avant sa mise en vente. Un an après, en mai 2016, le conseil municipal de Louveciennes déclasse un terrain situé au pied de l’Aqueduc.
Et pourtant « la Merveille de Marly » ne cesse d’éblouir encore aujourd’hui : « C’était quelque chose de monstrueux et de fantastique, un hérissement innombrable de bois et de fer, de leviers, d’éperons et de balanciers qui ressemblaient de loin à une forêt défeuillée…»
Saint-Germain, Bougival, ajoutons Viroflay. La municipalité voudrait raser la maison de Bon Repos où a vécu entre autre Elvire, l’égérie de Lamartine, malgré un projet imaginé par Frédéric Didier (architecte en chef des Monuments historiques) et la lutte opiniâtre d’une association locale.
Pourquoi, pourquoi, pourquoi ?
Colbert, Le Nôtre, Mansart… au secours !
Alain de La Bretesche,
Président de Patrimoine-Environnement
Pour en savoir plus :
- Association : Sauvegarde et renaissance de Bon Repos