Patrimoine-Environnement présent à l’AG des 50 ans d’ICOMOS
Patrimoine-Environnement, membre d’ICOMOS, a été invité à l’Assemblée Générale d’ICOMOS France. Elle y a été représentée par Alain Spire, administrateur de notre association, qui nous livre ici un compte-rendu intéressant et important.
L’ICOMOS (Conseil International des Monuments et des Sites) célèbre cette année son cinquantième anniversaire. Des commémorations auront lieu en juin dans tous les pays où cette ONG est présente, notamment à Varsovie où, un an après la rédaction de la Charte de Venise, le texte fondateur, elle fut créée en 1965. La même année, un Comité national français de l’ICOMOS, ancêtre d’ICOMOS France, fut mis sur pied et installé au Palais de Chaillot. Dès ce moment, la Ligue urbaine et rurale adhéra à l’organisation et son Président, Edmond Bollaert, fit partie des membres de ce premier Comité.
Quelques années plus tard, Henri de Segogne, fondateur de la FNASSEM, fut élu au bureau de l’association.
Ainsi donc, dès l’origine, des liens étroits, et au plus haut niveau, s’étaient noués entre l’ICOMOS et les deux associations d’où est issue Patrimoine-Environnement.
Il était donc tout à fait naturel que notre fédération, adhérente à l’ICOMOS, soit présente à l’AG qui s’est tenue le 27 mai 2015 à l’hôtel de Chaulnes, siège de l’Académie d’architecture, place des Vosges à Paris.
Introduite par Pierre-Antoine Gatier, président d’ICOMOS France, l’AG revêtait cette année, en raison de l’actualité, un caractère exceptionnel. Elle se devait de marquer son cinquantenaire mais aussi d’évoquer la situation préoccupante du patrimoine en Syrie et en Irak.
Ce n’est pas le lieu ici de livrer un compte-rendu exhaustif de cette réunion, on se bornera à résumer les points essentiels.
Le 50e anniversaire d’ICOMOS France
Un film de montage, composé d’interviews des « pères fondateurs » et de quelques administrateurs, a résumé le chemin parcouru par l’association depuis sa création, mettant en relief la volonté constante d’élaborer une doctrine en matière patrimoniale qui s’impose au niveau international.
Jean Sonnier, Yves Boiret, Michel Jantzen, Etienne Poncelet, Benjamin Mouton et Pierre-Antoine Gatier en ont successivement assuré la présidence et fait croître son importance, tant par le nombre de ses adhérents (70 à l’origine, 700 en 2006, 1230 aujourd’hui) que par ses contributions théoriques et pratiques au travers de groupes de travail, de colloques et de publications.
La sauvegarde du patrimoine en Syrie et en Irak
- Daniel Rondeau, ancien ambassadeur de France à Malte, ancien ambassadeur de la France auprès de l’UNESCO, journaliste et écrivain, a, dans un exposé vibrant et documenté, traité de la situation du patrimoine et des populations en Syrie et en Irak. Evoquant les destructions et menaces qui pèsent sur les musées et les sites du fait des islamistes, il a dénoncé une « guerre contre l’esprit, un nettoyage culturel visant à une lobotomie collective, à une tabula rasa« . Pour lui « cette déraison qui s’installe dans le temps et dans l’espace, cette véritable tragédie pour la liberté et la mémoire historique va peut-être aider les peuples à comprendre la nécessité de protéger leur patrimoine ».
- Samir Abdulac, Secrétaire Général d’ICOMOS France, a rendu compte de la réunion tenue le 22 avril dernier à la Cité de l’Architecture en présence de 80 personnes et visant à faire un point technique sur la situation en Syrie et Irak. Il a souligné les diverses initiatives locales prises, avec le concours de l’UNESCO, de l’ICOMOS, de l’ICOM… pour préserver les éléments qui pouvaient l’être, telle que la mise à l’abri des pièces transportables (Musée de Palmyre), mais aussi l’impossibilité de lutter contre les destructions de certains ensembles architecturaux et contre le trafic illicite des objets volés, extrêmement actif parmi une population civile ravagée par la guerre et la misère, et prête à tout « pour une poignée de dollars ».
- Bruno Favel, Chef de Département à la Direction Générale des Patrimoines, a exprimé le souhait que cette cause mobilise davantage. Il a rappelé la résolution 2199 du Conseil de Sécurité des Nations Unies, unanimement adoptée le 12 février 2015, qui condamne fermement la destruction des patrimoines culturels iraquien et syrien, qu’il s’agisse de dommages accidentels ou de destructions intentionnelles, notamment des sites et objets religieux qui font l’objet de destructions ciblées. La Résolution a adopté des sanctions visant à combattre le trafic illicite d’antiquités et de biens culturels en provenance de ces deux pays et demande aux Etats membres d’informer le Comité du Conseil de sécurité sur les actions prises pour se conformer pleinement à ces mesures avant le 12 juin 2015. Elle demande en outre que les objets ayant une valeur archéologique, historique, culturelle, scientifique ou religieuse, enlevés illégalement soient restitués aux peuples iraquien et syrien.
La « liste indicative » et les biens français proposés à l’inscription sur la liste du Patrimoine mondial
- Gardant la parole, Bruno Favel, s’est ensuite félicité de la qualité de la collaboration entre ICOMOS et le ministère de la Culture et de la Communication. Il a indiqué qu’ICOMOS France, section la plus importante au monde par le nombre de ses membres et ses multiples contributions, jouait un rôle majeur auprès d’ICOMOS international, notamment dans l’évolution de sa doctrine et de ses statuts qui désormais s’inspirent pour une large part de ceux de la section française. Il a remercié le « groupe patrimoine mondial » du travail théorique effectué sur les critères de révision de la liste indicative, travail commandé par le ministère qui va conduire à un « toilettage » de cette liste de 36 biens. Il a souligné que Vincent Berjot, Directeur Général des Patrimoines, suivait avec intérêt les actions d’ICOMOS France. Le ministère soutient activement les deux dossiers de candidature présentés par la France en 2015 : « Coteaux, maisons et caves de Champagne » et « Les climats du vignoble de Bourgogne ».
Le renouvellement du Conseil d’Administration
- Le mandat d’administrateur étant de 3 ans, le Conseil a été largement renouvelé dans ses 3 collèges (Architectes, Autres spécialistes, Institutionnels) de chacun 8 membres. C’est ainsi que Pierre-Antoine Gatier, Architecte en chef des Monuments historiques et Inspecteur général des Monuments historiques, qui a exercé avec efficacité et brio la présidence d’ICOMOS France pendant 3 mandats (9 ans) passera vraisemblablement le relai à son confrère, Jean-François Lagneau, ACMH et Inspecteur Général des Monuments historiques.
Suivie par une très nombreuse assistance, majoritairement composée d’architectes, paysagistes, représentants des Ministères de la Culture et de l’Ecologie, de professionnels du bâtiment mais aussi de plusieurs collectivités locales (Arles, Nîmes, Avignon, Dijon, Besançon, Poitiers,…), cette réunion a fait la preuve de la vitalité d’ICOMOS France. Patrimoine-Environnement ne peut que s’en réjouir, à une époque où le patrimoine, que ce soit en France ou à l’étranger, est exposé, plus que jamais – et à une échelle inédite -, à de multiples menaces.