Le gouvernement va-t-il autoriser à nouveau la déviation de Beynac…
…au mépris du patrimoine, de la nature et de l’état de droit, et en donnant un signal de laxisme budgétaire au collectivités locales ?
Rappelons que le projet de déviation de Beynac est celui d’une route de 3,2 km qui franchirait deux fois la Dordogne, dans une vallée où la rivière, sauvage, est ornée de cinq châteaux célèbres. Pendant trente ans, les défenseurs du patrimoine et de l’environnement se sont unis pour le combattre, par des pétitions et des occupations de chantier, jusqu’à ce que les tribunaux l’annulent en 2019.
Cela n’a pas découragé le Département de la Dordogne qui présente à nouveau, pour 42 millions d’euros, sous le nom de Boucle multimodale, le projet de la même route et des mêmes ponts, seulement agrémenté d’un sens interdit, d’une halte ferroviaire à la gare voisine et d’une improbable navette électrique. Il s’agit de le déclarer « nouveau » pour échapper à l’autorité de la chose jugée.
Or, la Dordogne est le 4ème département le plus endetté de France. Il va terminer l’année 2024 avec un lourd déficit. Pour la déviation de Beynac, il est pourtant condamné à une astreinte de 5 000 euros par jour tant qu’il n’aura pas remis les lieux en l’état, c’est-à-dire la démolition des piliers déjà réalisés. À ce stade, il a déjà dû verser 2 millions …
Malgré tout, l’enquête publique, qui s’est déroulée en juillet et août, a fait l’objet d’un avis favorable sans réserve, les commissaires enquêteurs ayant fait un copié-collé de l’argumentation du Département, le Préfet de la Dordogne annonçant qu’il prendra sa décision « en son âme et conscience ».
En réalité, sa décision sera très certainement celle du gouvernement.
Sacrifiera-t-il le patrimoine d’un des plus beaux endroits de France? Ira-t-il à l’encontre du jugement du Conseil d’État, meilleur moyen de donner raison aux opposants au projet d’autoroute 69 Toulouse-Castres qui contestent un jugement sur la même matière ? Encouragera-t-il le département de la Dordogne à s’endetter encore plus ?
Par Kléber Rossillon,
Président d’honneur de Patrimoine-Environnement