Le glas sonne pour Barcelone
À la fin des vacances, chacun d’entre vous ramène dans ses bagages des expériences touristiques, et parmi celles-ci des visites parfois oppressantes, parmi la foule, au Mont-Saint-Michel, à Versailles ou dans certains châteaux de la Loire.
Les événements de Barcelone ont mêlé à peu de jours d’intervalle les manifestations des Catalans défendant leur cadre de vie contre ce genre d’oppression, qu’ils vivent comme une « agression touristique », et un drame mondialement ressenti sur las Ramblas.
Une fois de plus, après les Champs-Élysées, le marché de Noël de Berlin, le centre de Londres, la promenade des Anglais, ou le musée du Bardo à Tunis, les hauts-lieux du tourisme culturel sont et seront malheureusement la cible de la guerre que nous livre l’État Islamique. Un conflit qui va durer.
Après les sanglants attentats de Paris, les chiffres de la fréquentation touristique dans les grands monuments emblématiques ont chuté considérablement, mais les touristes étrangers oublient vite leur traumatisme d’une année. En Espagne, les chaînes d’information en continu ont permis de constater que las Ramblas de Barcelone ont mis seulement quelques jours à se remplir à nouveau de touristes internationaux.
Bien sûr ce n’est pas seulement aux professionnels du Tourisme ou aux détenteurs de Patrimoine de faire face à cette guerre du XXIe siècle ; de même que les attaques et la destruction de Palmyre, des bouddhas en Afghanistan, des lieux de culte à Mossoul ou en Égypte ne doivent pas peser seulement sur quelques conservateurs extraordinairement courageux. Tout au plus faut-il souligner que la sécurité des personnes devient un enjeu mondial dans les lieux de la culture, quelque soit la contrée de l’univers où ils ont été construits et conservés.
Certes, à Paris comme à Barcelone nous entendrons beaucoup de » nous n’avons pas peur » en français ou de « no tenim por » en catalan. Mais c’est plus facile à dire qu’à faire et le temps est partout venu de l’application d’un principe de précaution quasi quotidien.
Le monde de la culture et spécialement de la culture patrimoniale a cependant une responsabilité spécifique dans cette guerre : il s’agit de rappeler sur tous les tons que cette culture et ce patrimoine sont un bien commun de l’humanité toute entière et que c’est en faisant progresser la connaissance dans toutes les couches de la société que l’on pourra à terme éviter que les iconoclastes se transforment en assassins. Ainsi peut-on espérer, dans longtemps, que les voyages, le tourisme et les vacances ne signifieront plus les larmes et la douleur.
En effet, à la différence d’un monument « un homme ça peut être vaincu, mais pas détruit » comme l’a écrit Ernest Hemingway dans l’Adieu aux Armes.
Alain de La Bretesche,
Président de Patrimoine-Environnement