L’association du mois – La Folie de Pantin
L’association La Folie de Pantin est une nouvelle adhérente à Patrimoine-Environnement, nous vous proposons de la découvrir.
Alors que la pression immobilière ne cesse de croître dans le Grand Paris, il y a une prise de conscience de la fragilité d’un patrimoine peu connu, qui représente une trace de l’histoire de la banlieue avant qu’elle ne soit urbanisée. Ces territoires, peu valorisés jusqu’à maintenant, s’attachent actuellement à redécouvrir leur identité pour fonder leur développement et créer une nouvelle attractivité : cela passe par une meilleure connaissance de leur patrimoine bâti et paysager. Le Plan local d’urbanisme intercommunal (PLUi) d’Est Ensemble, voté fin 2019, place d’ailleurs la valorisation de son patrimoine parmi ses priorités[i].
La Folie de Pantin est un exemple emblématique de la redécouverte d’un patrimoine oublié de la banlieue, qui reflète pourtant l’essence même du développement de ce territoire limitrophe de Paris, en Seine-Saint-Denis. Notre association, créée en 2018, a pour objectif de faire connaître la richesse de ce site actuellement en friche, et de lui imaginer un avenir. C’est un site à multiples facettes dont l’intérêt patrimonial se situe à plusieurs niveaux.
Construite en 1795 (c’est le deuxième édifice le plus ancien de la ville), inscrite aux Monuments historiques en 1984[ii], elle appartient à la Ville de Pantin. Auparavant maison de carrier, la Folie est intimement liée aux carrières de gypse qui se sont développées sur les contreforts du plateau de Romainville entre le 16e et le 19e siècle. Située à proximité immédiate des carrières, elle est construite entièrement en moellons de gypse recouverts d’enduits de plâtre[iii]. On ne peut mieux faire en matière de matériaux locaux et biosourcés ! Les carrières figuraient parmi les activités principales de ce village par ailleurs agricole au début du 19e siècle : son plâtre était particulièrement réputé[iv].
« Embellie » en 1795 par l’architecte Perrard de Montreuil, à qui l’on doit quelques hôtels particuliers et la Rotonde du Temple à Paris, elle devient maison de plaisance, comme il y en a beaucoup dans les environs de Paris. Plusieurs propriétaires s’y succèdent (dont un futur Régent de la Banque de France, ou la marquise de Montesson), avant qu’elle ne soit transformée en 1870 en maison de rapport. Elle entame alors une troisième vie : des familles d’ouvriers et d’employés y sont logées, alors que la ville connaît un essor industriel très important. Les derniers habitants seront contraints de la quitter en 1995 pour cause d’insalubrité.
Depuis 2000, la Région Ile-de-France avait le projet d’en faire une Maison de la nature pour la base de loisirs de la Corniche des Forts, projet sans cesse reporté, et finalement abandonné en 2019. Notre association est alors intervenue pour inciter la Ville à reprendre en main l’avenir du site, et pour informer les habitants de ce patrimoine méconnu : nous avons signalé la Folie à la Mission Bern, créé un site internet et une page Facebook, proposé un projet dans le cadre du budget participatif de la Ville.
Finalement,
la Ville a lancé un appel d’offres pour réaliser une étude sur la Folie et son
insertion dans le quartier, en vue de sa restauration. L’association mènera en
parallèle, et en coopération avec la Ville, une réflexion sur les usages
possibles de la Folie : nous souhaitons élaborer
un projet de réutilisation avec les forces vives du territoires (habitants,
associations, entreprises, créatifs, etc.) pour ce lieu qui devrait être ouvert
à tous les habitants, et pourrait accueillir de multiples activités (culturelles,
sportives, de l’agriculture urbaine, un bar/restaurant associatif, des
hébergements insolites, des activités autour du gypse, etc…). La Folie pourrait
devenir un tiers-lieu qui permette au site d’être vivant et d’accueillir des
populations très diverses, à l’image des habitants de la ville. La Folie
pourrait ainsi entamer sa quatrième vie, en cohérence avec son riche passé, et
portée par une dynamique citoyenne.
Antoine Monpert,
Vice-président de l’association La Folie de Pantin
En savoir plus
- Site internet
- Des activités seront organisées par l’association autour de la Folie pour les Journées européennes du patrimoine les 19 et 20 septembre.
[i] L’un des trois axes du PLUi est : « L’héritage, la résilience et la transition écologique comme moteurs d’une évolution maîtrisée pour mettre en valeur le patrimoine bâti, naturel, paysager mais aussi social, culturel et économique »
[ii] Il y a 5 monuments historiques à Pantin, et 72 en Seine Saint Denis : c’est le département qui compte le moins de monuments historiques en France, il est d’autant plus important d’en prendre soin.
[iii] Tiffanie Le Dantec, architecte du patrimoine, a publié une thèse en 2019 portant sur les façades enduites au plâtre en Ile-de-France, qui a permis de découvrir la variété et les qualités de ces enduits. La Folie faisait partie des édifices étudiés. http://www.theses.fr/2019SACLV001
[iv] La Ville possède un pôle Mémoire et Patrimoine qui s’attache à faire connaître l’histoire de la ville : https://patrimoine.ville-pantin.fr/