La politique du logement dans les programmes de la majorité présidentielle actuelle
Au cours de son intervention télévisée du 29 janvier dernier, le Président de la République a annoncé, comme l’une des sept mesures propres à relever l’économie que, pour faire baisser le coût des logements en France :
« Tout terrain, toute maison, tout immeuble verra sa possibilité de construction augmenter de 30% ».
Applicable dès son adoption par le Parlement au mois de février et pour trois ans, cette mesure devrait « augmenter considérablement le nombre de logements, donc [faire] pression sur les prix ».
Nicolas Sarkozy espère aussi que cela donnera « un travail formidable à l’industrie du logement », vivier d’emplois non-délocalisables.
Le Président de la République a ajouté que, « pour respecter le droit de libre administration des collectivités locales », la loi nouvelle prévoira que chaque commune pourra décider par une délibération spéciale « de ne pas appliquer les nouvelles mesures ».
Il faudra attendre le texte de la loi pour savoir comment cette nouvelle mesure s’articulera avec les dispositions de la loi SRU votée en 2000 obligeant les communes des grandes agglomérations à construire des logements sociaux pour atteindre le seuil de 20%.
Il faudra aussi regarder de près si la loi du 5 janvier 2011, qui limitait à 20% (au lieu de 30% dans le cas général) la possibilité de construire sur les surfaces foncières se trouvant dans un secteur sauvegardé, dans les ZPPAUP et de manière générale dans tous les secteurs protégés, restera en vigueur.
La semaine dernière, à Châlons-en-Champagne, à l’occasion du séminaire de l’Association Nationale des Villes et Pays d’Art et d’Histoire et des Villes à Secteurs Sauvegardés et Protégés, le secrétaire d’Etat au logement, Benoist Apparu, au cours d’un dialogue public avec le signataire de ces lignes, avait quasiment annoncé la mise en place d’une telle mesure.
Les élus présents, parmi lesquels Denis Granjean Maire-adjoint à l’Urbanisme de Nancy et Jean Rouger Maire de Saintes, tous deux vice-présidents de l’Association nationale précitée, ont fait connaître au ministre leur grande inquiétude pour le patrimoine et les paysages des villes à secteurs protégés.
Benoist Apparu a insisté sur la nécessaire densification des agglomérations urbaines de toute nature dès lors que, par ailleurs, la maîtrise foncière voulue par la loi Grenelle II interdirait de continuer l’urbanisation des terres agricoles aujourd’hui consommatrices de 66.000 hectares chaque année.
Un débat a alors eu lieu sur les choix à faire entre la construction neuve et la restauration des logements vacants. Sur l’une de mes questions Benoist Apparu a évalué à 2 millions le nombre de logements vacants sur le territoire français.
Il a cependant refusé de se prononcer sur une grande politique de restauration estimant que ces logements restaurés ne conviendraient sans doute pas aux demandeurs de logement.
Pourtant, les jeunes étudiants et les personnes âgées, se satisferaient sans doute de la possibilité de rester dans un cadre de vie qui est le leur dès lors que ces logements seraient mis en état en respectant les règles du centre historique et sa mixité sociale traditionnelle.
Ce discours, très transversal (l’Association nationale des villes d’Art regroupe des villes de droite et des villes de gauche) a beaucoup de mal à être entendu aujourd’hui par les hautes instances de l’Etat.
Le débat rejoint évidemment ceux dont nous vous avons parlé sur ce site récemment : la construction en hauteur à Saint-Cloud, à Versailles, à Garches, dans l’Ile Seguin, pour ne citer que quelques unes des villes concernées.
Au cours de son discours programme, François Hollande, pour sa part, a indiqué qu’il ferait en sorte que les terrains appartenant à l’Etat soient mis à la disposition gratuite des collectivités locales afin d’accélérer la construction des logements sociaux. Il a également précisé que le quota de logements sociaux de la loi SRU serait porté à 25% avec une pénalité pour inexécution de l’objectif multipliée par cinq.
Le candidat socialiste escompte deux millions et demi de logements nouveaux sur son futur quinquennat dont 150.000 très sociaux.
Sauf erreur il ne parle pas à ce jour des logements vacants.
Aujourd’hui, la très sympathique Fondation Abbé Pierre demande, « façon Nicolas Hulot », aux candidats de prendre par écrit des engagements pour le logement que nous vous laissons le soin de lire sur le site de la Fondation : www.fondation-abbe-pierre.fr. Vous verrez que celle-ci demande entre autre d’introduire la notion de développement durable dans les quartiers populaires et de reconstruire des logements sur les secteurs démolis.
Les membres des associations du patrimoine doivent participer aux débats ainsi ouverts pour y jouer leur rôle :
- demander que les communes s’occupent par priorité des logements vacants, en respectant les paysages et l’harmonie de la ville et, bien sûr, en garantissant ainsi une vraie mixité sociale apaisée ;
- ne pas oublier les entrées de ville si lamentables en France ;
- rappeler que, pour ce faire, une vraie politique d’incitation fiscale doit être mise en place pour que les fonds du secteur privé y soient associés. Cela suppose un changement de cap assez radical par rapport aux options actuellement suivies.
Alain de la Bretesche
Secrétaire Général de Patrimoine-Environnement
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