Compte-rendu du Colloque et Remise de Prix du Concours des Entrées de ville & reconquête des franges urbaine 2018
Jeudi 13 décembre 2018, dans le prestigieux salon des Maréchaux au Ministère de la Culture, les associations Patrimoine-Environnement et Sites & Cités Remarquables de France ont remis le prix national de la 15ème édition du concours national “Entrées de ville et de reconquête des franges urbaines” à la ville de Chorges (05). Une mention spéciale a également été décernée à la ville de Cantenay Epinard (49).
Pour cet événement un colloque a été organisé afin de présenter et transmettre des pratiques innovantes concernant l’amélioration des entrées de ville. Ainsi, les élus et les maîtres d’œuvre des projets sélectionnés par le jury ont échangé sur leurs expériences et sensibilisé le public à la transformation de ces espaces et à l’incidence de leurs évolutions sur les paysages. Des interventions au préalable ont permis également de poser le constat sur l’évolution galopante de l’étalement urbain.
Patrick GEROUDET, vice-président de Sites & Cités remarquables de France, a ouvert le colloque. Il expose la nécessité de reconquérir les franges urbaines. En effet, les entrées de ville sont dénaturées par la présence abondante des publicités, ou encore des zones commerciales. De par cette banalisation, cette standardisation, les entrées des villes se ressemblent, rebutent et s’opposent à la qualité des projets des centres-villes.
Afin de les différencier et de valoriser le cadre de vie des habitants, il est pripatrimoinemordial de requalifier ces entrées en révélant leurs valeurs patrimoniales et identitaires et de les reconnecter au centre-ville.
Michel ROUGET, directeur et Aline THOMAS, projet et design urbain de l’Agence d’Urbanisme Besançon centre Franche-Comté, sont intervenus afin d’apporter leur position sur le sujet à partir d’exemples de terrain et la présentation de méthodes et d’outils. Ils expliquent l’importance d’identifier les entrées de ville. En effet, elles définissent la première approche, provoquent les premières impressions des visiteurs sur la ville. De même, les projets de reconquête doivent s’articuler autour de trois enjeux principaux. Il s’agit de se questionner sur l’image de la ville à renvoyer (valorisation de l’identité, du paysage, promouvoir les éléments patrimoniaux, …), de créer une cohérence et une harmonie architecturale et urbanistique et de s’interroger sur les usages à implanter.
De plus, il est important d’évoluer sur les procédés d’aménagement et de limiter l’étalement urbain afin de préserver l’environnement.
En effet, Géraldine DUCOS, chargée d’études économiques dans le domaine de l’aménagement du territoire au Commissariat Général au Développement Durable, propose une définition de l’artificialisation (établie par ECDE – INRA – INFART). Cette notion comprend trois dimensions : l’imperméabilisation des sols dû aux changements des caractéristiques physiques et biologiques des sols, la perte des espaces naturels (agricoles, naturels et forestiers) au profit des espaces urbains et la forme du développement urbain soit l’étalement urbain.
Ainsi, cette artificialisation provoque de nombreux impacts, notamment environnementaux. La perte des espaces naturels entraîne des pertes dans les fonctions productives des sols agricoles, dans la richesse de la biodiversité, dans la qualité de vie et produit une augmentation des inondations et des pollutions de l’eau.
De plus, l’étalement urbain entraîne une augmentation importante des gaz à effet de serre, de la répétition des équipements et services dans chaque commune.
Ainsi en 1980, l’artificialisation représentait 20000km², soit 4% du territoire français. Demain, en 2030, ce phénomène touchera 45000km², soit 8%.
Par contradiction, des études présentent que l’espace urbain est sous utilisé. En effet sur la totalité de l’artificialisation, 20% de cette surface se trouve dans des communes où la population diminue. Cette artificialisation est traduite par 80000 logements vacants chaque année dans l’espace urbain et par une augmentation de 5% des commerces vacants.
De part ces résultats, il est nécessaire de réhabiliter, d’intégrer les éléments déjà présents dans les futurs projets urbains. Pour cela, plusieurs lois telles que la loi de logement et d’urbanisme, la loi agricole, le plan biodiversité et la stratégie nationale bas-carbone présentent des objectifs de réduction de cette artificialisation. De même, des programmes, tels que la Réhabilitation des Tissus Urbanisés (R.T.U.), tentent de réduire cette artificialisation.
A cela, il est important d’apporter de nouvelles distributions de l’espace. En effet, interrogé par Denis Grandjean, expert et membre du comité de pilotage, Franck GINTRAND, Délégué général de l’Institut des Territoires, nous décrit que « les zones commerciales sont une partie de l’étalement urbain, sont même des locomotives de l’étalement urbain ».
Les zones commerciales sont même des locomotives de l’étalement urbain.
A l’origine, les zones commerciales ont été construites afin de recevoir des structures qui ne peuvent pas s’implanter dans le tissu urbain. Cependant, la tendance tend à s’inverser. En effet, « ces grandes surfaces ont muté en recevant des commerces de détails dont la vocation est d’être au centre-ville ». Ainsi, les zones commerciales périphériques vident en grande partie les centres villes de leurs commerces et deviendront les futurs centres-villes. Tels que les éléments naturels, « la ville est un écosystème fragile dont les actions tendent à s’inverser ».
De part ces constats, Alain de LA BRETESCHE, président de Patrimoine-Environnement annonce que les membres du jury ont souhaité valoriser les efforts accomplis et encourager les équipes municipales volontaires des villes de Chorges et de Cantenay-Epinard.
En effet, la ville de CHORGES a été récompensée pour sa reconquête de l’axe de la RN94, dont la maitrise d’œuvre a été confiée à l’agence PAYSAGES. Il s’agissait de requalifier l’entrée de la gare, les abords de la ville ancienne et de valoriser le paysage montagnard.
Le projet a permis d’améliorer la fluidité du trafic via l’implantation d’un carrefour giratoire, de créer de nouveaux espaces publics (requalification du parvis de la gare SNCF, création de nouveaux pôles d’échanges multimodaux urbains), d’insérer des circulations douces et sécurisées, de permettre une plus grande lisibilité de l’espace public (suppression de panneaux publicitaires, traitement paysager, réorganisation des stationnements, délimitation des espaces selon les transports) et de valoriser et améliorer l’accès au centre-village (sortir le quartier de son environnement routier, donner un caractère urbain, créer une liaison piétonne entre les différents services).
De plus, le maire de Chorges et son équipe ont mis en place une participation citoyenne pour l’élaboration du projet (concertation publique, médias locaux).
Quant à la ville de CANTENAY-EPINARD, le jury a adressé une mention spéciale. C’est autour de la valorisation de la Mayenne que s’articule le projet de requalification de l’entrée de bourg dont la maitrise d’œuvre a été confiée à l’Agence VU D’ICI (Paysage et Urbanisme). Celui-ci se caractérise par la valorisation du paysage via la ré-insertion de surfaces végétalisées, par la redéfinition des flux des circulations piétonnes et cyclistes et la présence de nouvelles péniches.
Une structure d’accueil pour le public ainsi qu’un théâtre de verdure permettent de créer des temps forts au sein de la commune.
Toutes ces actions remettent en harmonie l’entrée de bourg avec son environnement naturel proche. De plus, le projet ouvre les bords des rivières qui étaient jusque-là enclavés et conduit la réhabilitation d’un presbytère en espace culturel.
Dans une volonté de concertation et de participation, le maire de Cantenay Epinard et son équipe ont intégré les habitants et notamment les pêcheurs et les écoles dans le projet.
Ces projets permettent de montrer aux différentes communes des principes et des techniques d’aménagement, de les encourager dans leur démarche et de les valoriser en tant que modèle réussi. Enfin, une action de concertation et de participation ne peut qu’enrichir et approuver le projet.
Le colloque s’est terminé par la remise des prix (plaque + voyage d’étude) et les discours des Ministères, soutiens du Concours : Jean-Michel LOYER-HASCOËT, adjoint au directeur général des patrimoines, Ministère de la Culture, et Patrick BRIE adjoint à la sous-directrice de la qualité du cadre de vie, Ministère de la Transition écologique et solidaire.
Le jury 2018 était composé de professionnels et représentants de: Assemblée des Communautés de France – Association des Maires de France – Caisse des Dépôts, Banque des Territoires – Fédération Française du Paysage – Fédération Nationale des Agences d’Urbanisme – Fédération Nationale des CAUE – Paysages Actualités, Groupe Moniteur – Ministère de la Transition écologique et solidaire -Ministère de la Culture – Office Professionnel de Qualification des Urbanistes – Patrimoine-Environnement – Sites & Cités Remarquables de France – Ville de Sarralbe, lauréat 2016