Foire aux questions sur les édifices cultuels

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Dans le cadre de sa mission de conseils et afin de vous éclairer sur les problématiques récurrentes liées aux édifices cultuels, Patrimoine-Environnement vous propose une foire aux questions sur le sujet. Au programme :

I. La propriété des édifices du culte depuis la loi de 1905
II. La désaffectation des édifices du culte
III. Utilisations particulières d’un édifice du culte
IV. La démolition des édifices du culte
V. L’entretien et la restauration des édifices du culte et leur financement

Retrouvez toutes les réponses à vos questions !

I. La propriété des édifices du culte depuis la loi de 1905

1. Qui est propriétaire des édifices du culte ?

Les églises construites après 1905

En règle générale, les édifices du culte acquis ou construits après 1905 sont la propriété des seules home-with-key-icon-26personnes privées qui les ont acquis ou construits, celles-ci sont généralement des associations cultuelles, des associations diocésaines ou des associations régies par la loi du 1er juillet 1901.

Les églises construites avant 1905

La loi de séparation des Eglises et de l’Etat, en 1905, a prononcé la dissolution des établissements publics tels que les menses, fabriques, conseils presbytéraux ou consistoires et a prescrit le transfert des biens mobiliers et immobiliers aux associations cultuelles dont elle définissait les principes constitutifs.

Le culte protestant et le culte israélite ont accepté les principes posés par la loi du 9 décembre 1905. Les édifices du culte appartenant à leurs établissements publics sont donc devenus la propriété des associations cultuelles qu’ils ont mises en place.

En revanche, l’église catholique a refusé la constitution d’associations cultuelles. Ses édifices du culte n’ont donc pas pu être attribués à de telles associations.

Deux dispositions ont alors permis de régler le sort de ces édifices. D’une part, l’article 5 de la loi du 2 janvier 1907 prévoit qu’ « à défaut d’associations cultuelles, les édifices affectés à l’exercice du culte, ainsi que les meubles les garnissant, continueront, sauf désaffectation dans les cas prévus par la loi du 9 décembre 1905, à être laissés à la disposition des fidèles et des ministres du culte pour la pratique de leur religion ». Les alinéas suivants de cet article 5 fixent les conditions de cette jouissance gratuite. D’autre part, l’article 1er de la loi du 13 avril 1908 est venu compléter ce dispositif, précisant que par exception au régime des attributions de biens par décret, les édifices affectés au culte lors de la promulgation de la loi du 9 décembre 1905 et les meubles les garnissant deviendront la propriété des communes sur le territoire desquelles ils sont situés s’ils n’ont été ni restitués, ni revendiqués dans le délai légal. Ainsi, les églises construites avant 1905 sont devenues, dans leur très grande majorité, la propriété des communes.

Par ailleurs, la propriété de l’édifice implique non seulement celle des immeubles par destination que sont les meubles fixés à l’édifice (tableaux, stalles, orgues, cloches, statues…) mais aussi celle des objets mobiliers qu’il renferme. Si les objets mobiliers garnissant l’édifice du culte avant 1905 appartiennent au propriétaire de l’édifice, ils restent grevés de l’affectation cultuelle, de sorte que la collectivité publique propriétaire ne peut en faire un autre usage que celui réservé à la pratique de la religion.

2. Quels biens sont considérés comme des dépendances d’un édifice du culte et reçoivent ainsi une affectation légale au culte ?

Dans sa circulaire du 29 juillet 2011, le Ministre de l’Intérieur a précisé que la loi de 1905 ne se détermine pas précisément d’une manière littérale sur ce point. Il faut donc s’appuyer sur la jurisprudence des juridictions administratives.

Des décisions déjà assez anciennes et jamais remises en cause sont considérées par la circulaire comme du droit positif.

Ainsi, sont considérés comme dépendances d’un édifice du culte :

      • Le mobilier en place (stalles, orgues, etc.) dans les édifices affectés au culte en 1905 (CE 17 février 1932, Commune de Barran) ;
      • Un calvaire associé à l’exercice du culte lors de processions (CE 01er avril 1938, Abbé Laplanche Couderc et autres) ;
      • Les abords immédiats quand ils sont nécessaires à la tranquillité et à la dignité des célébrations ou quand ils sont utilisés à des fins cultuelles (TA Lille 01er juillet 1954). Un parvis est donc une dépendance du culte si, par exemple, s’y déroulent à Pâques la cérémonie du feu ou aux Rameaux la bénédiction de ceux-ci et si le célébrant vient y accueillir les cortèges funèbres. Les pouvoirs de police appartiennent alors au curé affectataire qui peut par exemple y interdire le stationnement les jours de célébration et particulièrement le dimanche ;
      • La chapelle située sous l’abside de l’église (TA Paris 08 juin 1971, Ville de Paris c/ Kergo) ;
      • La sacristie attenante à l’édifice (CE 18 mars 1988, Albert Maron) ;
3. Les presbytères attribués aux communes depuis la loi de 1905 peuvent-ils être vendus librement par la commune ?

Les presbytères ne sont pas considérés comme des dépendances des édifices affectés au culte et font donc parties du domaine privé des communes (TC 14 mai 1990, Commune de Bouyon c/ Battini) qui peuvent alors les céder librement.

4. Quel est le statut des lieux de culte dans les établissements scolaires ?

En ce qui concerne les chapelles qui existaient dans certains établissements scolaires au moment de l’entrée en vigueur de la loi du 9 décembre 1905, la question peut se poser de savoir s’ils sont grevés d’une affectation cultuelle au même titre que les édifices du culte ouverts au public. En vertu de cette loi, les chapelles qui appartenaient à l’Etat, aux départements, aux communes ou aux établissements publics du culte et qui servaient à l’exercice public du culte en 1905 bénéficient depuis cette date du régime de l’affectation cultuelle.

5. Quel est le statut des aumôneries dans les établissements hospitaliers, militaires et pénitentiaires ?

Sur le fondement de la loi de 1905, des services d’aumônerie sont organisés dans les établissements de santé, les maisons de retraite, les établissements pénitentiaires et les casernes ou campements militaires afin de permettre aux personnes qui y vivent de pouvoir exercer leur culte librement. Le service d’aumônerie et les cérémonies cultuelles y sont organisés soit dans un édifice du culte existant au sein de l’établissement, soit dans une salle polyvalente mise à disposition à cet effet.

En l’absence de disposition spécifique sur les modalités de financement des lieux de culte nécessaires au fonctionnement de ces services d’aumônerie, la loi de 1905 s’applique. Les dépenses d’investissement et de fonctionnement des lieux de culte ou locaux réservés aux services d’aumônerie sont à la charge des établissements avec la participation éventuelle des collectivités publiques.

6. Quel régime de propriété s’applique aux édifices conventuels (abbayes, prieurés, monastères…) ?

La loi de 1905 s’applique uniquement aux biens confiés par le Concordat de 1802 au Clergé séculier (archevêques, évêques, prêtres séculiers), c’est-à-dire les églises et chapelles paroissiales qui sont restées dans les termes de la loi de 1905 à la disposition des curés affectataires, et aux séminaires, palais épiscopaux et écoles qui ont été « rendus » à l’Etat par l’effet de ladite loi.

Les congrégations religieuses de type ordre mendiant, abbaye, prieuré, etc. sont pour leur part régies par la loi du 01er juillet 1901 dans son titre III qui a été ajouté en 1903.

Par conséquent, les bâtiments conventuels qui sont aujourd’hui toujours occupés par un ordre religieux sont nécessairement, si la congrégation est régulièrement autorisée, soit la propriété de la congrégation, soit mis à sa disposition par un propriétaire public ou privé.

Les règles de l’affectation de la loi de 1905 ne jouent donc pas, sauf si l’église abbatiale ou la chapelle de la congrégation est un même temps une église paroissiale affectée au culte depuis une date antérieure à la loi de 1905.

II. La désaffection des édifices du culte

7. En quoi consiste la désaffection des édifices cultuels construits avant 1905 ?

L’affectation cultuelle d’un édifice peut cesser. La désaffectation est décidée soit par décret en Conseil d’Etat, soit par arrêté préfectoral, soit par une loi.church

Désaffectation par décret en Conseil d’Etat

En cas de désaccord entre la commune propriétaire et l’affectataire ou bien si l’édifice appartient au département ou à l’Etat, la désaffectation pourra être prononcée par décret en Conseil d’Etat si l’une des conditions énumérées par l’article 13 de la loi du 9 décembre 1905 est remplie :

« 1° Si l’association bénéficiaire est dissoute ;

2° Si, en dehors des cas de force majeure, le culte cesse d’être célébré pendant plus de six mois consécutifs ;

3° Si la conservation de l’édifice ou celle des objets mobiliers classés en vertu de la loi de 1887 et de l’article 16 de la présente loi est compromise par insuffisance d’entretien, et après mise en demeure dûment notifiée du conseil municipal ou, à son défaut du préfet ;

4° Si l’association cesse de remplir son objet ou si les édifices sont détournés de leur destination ;

5° Si elle ne satisfait pas soit aux obligations de l’article 6 ou du dernier paragraphe du présent article, soit aux prescriptions relatives aux monuments historiques. »

Désaffectation par arrêté préfectoral : la procédure simplifiée en cas d’accord entre la commune propriétaire et l’affectataire

Le décret n°70-220 du 17 mars 1970 portant déconcentration en matière de désaffectation des édifices cultuels énonce que « dans les cas prévus au deuxième alinéa de l’article 13 de la loi susvisée du 9 décembre 1905, la désaffectation des édifices cultuels communaux ainsi que des objets mobiliers les garnissant, est prononcée par arrêté préfectoral à la demande du conseil municipal, lorsque la personne physique ou morale (par exemple l’évêque ou l’association cultuelle) ayant qualité pour représenter le culte affectataire aura donné par écrit son consentement à la désaffectation. »

Désaffectation par une loi

En dehors des cas prévus par l’article 13 de la loi du 9 décembre 1905 et le décret du 17 mars 1970, la désaffectation d’un édifice du culte ne pourra être ordonnée que par une loi.

8. La désaffection d’un édifice du culte peut-elle être décidée par la commune ?

La désaffectation de fait d’une église ou d’une chapelle n’existe pas. Même si un édifice du culte n’est pas utilisé pendant plusieurs années, il restera affecté au culte tant qu’aucune décision de désaffectation, strictement prévue par les textes, n’aura été prise (arrêté préfectoral, décret en Conseil d’Etat, loi). On parle alors de désaffectation de droit.

Par conséquent, une commune ne peut pas désaffecter un édifice du culte sur délibération du conseil municipal ou par arrêté municipal, même si elle a obtenu l’accord du curé. La désaffectation devra obligatoirement être acceptée par l’évêque puis reconnue par le Préfet qui prendra alors un arrêté préfectoral de désaffectation de l’édifice.

III. Utilisations particulières d’un édifice du culte

9. Le maire peut-il procéder librement à la fermeture d’une église ?

Le maire ne peut procéder à la fermeture de l’édifice du culte sans porter atteinte au libre exercice du culte sauf circonstance exceptionnelle justifiant d’une telle décision, par exemple quand l’édifice menace de s’effondrer (CE 26 mai 1911, Sieur Ferry et autres). Cette mesure doit être provisoire.

10. Peut-on prendre des photos dans une église, librement et sans autorisation ni paiement de
redevances particulières ?

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L’article 17 de la loi de 1905 édicte que la visite d’une église et de ses objets mobiliers

est gratuite et ne pourra donner lieu à aucune redevance. Ainsi dès lors que le curé affectataire qui dispose des pouvoirs de police dans l’édifice vous a donné son accord, rien ne s’oppose à vos prises de vue.

Cependant l’article L2124-31 du code général de la propriété des personnes publiques permet que des redevances soient néanmoins perçues « lorsque la visite de parties d’édifices affectés au culte, notamment de celles où sont exposés des objets mobiliers classés ou inscrits, justifie des modalités particulières d’organisation ». Il faut alors que soit formalisé un accord entre la commune propriétaire et l’affectataire. Cet accord peut aller jusqu’à la perception d’une redevance et prévoir son éventuel partage.

11. Un édifice affecté au culte peut-il être utilisé temporairement à d’autres fins (expositions, concerts…) ?

Utilisation extra-cultuelle des cathédrales

Depuis 1995, la gestion domaniale des 87 cathédrales classées Monuments Historiques et affectées au Ministère de la Culture et de la Communication est confiée au Centre des Monuments Nationaux, qui autorise les manifestations non cultuelles et perçoit les redevances correspondantes.

Utilisation extra-cultuelle des églises communales

Aucune manifestation non cultuelle ne peut être organisée dans une église communale sans l’accord formel des autorités religieuses locales, seules juges du respect de l’affectation des lieux. En cas de refus de ces dernières et compte tenu de la position de la Conférence des Evêques de France sur la possibilité de coupler un usage cultuel et un usage culturel d’un lieu de culte peu fréquenté, une médiation de l’Evêque peut être sollicitée.

IV. La démolition des édifices du culte

12. Comment s’opposer à la démolition d’une église appartenant à la commune ?79789-derrick-with-ball

Dans un premier temps, il faut inciter les habitants de la commune et des environs à constituer une association pour porter en commun le combat de défense de l’édifice, sans se limiter aux paroissiens, les non-pratiquants participant souvent aux actions de préservation du patrimoine.

Patrimoine Environnement recommande le recours à un référendum local afin de permettre à la population locale de faire connaître son opinion sur le projet de démolition.

Il est également conseillé de se rapprocher de l’évêque car en vertu de la loi de 1905, une église ne peut être démolie qu’après désaffectation et c’est à l’évêque de donner son accord à cette désaffectation.

Le cas échéant, il est utile de se rapprocher du curé affectataire puisque les travaux ne peuvent être effectués qu’en concertation entre la collectivité propriétaire et le curé affectataire et dans la mesure du possible en y associant la commission diocésaine d’art sacré. En tout état de cause, les travaux ne sauraient empêcher le libre exercice du culte.

En parallèle, l’examen de la légalité de l’arrêté de péril pris par le maire est indispensable. L’arrêté de péril est en effet un préalable nécessaire à la démolition de l’édifice. Dans la mesure où « la démolition de tout ou partie d’une église ou de ses dépendances ne saurait être ordonnée que s’il n’existe aucun autre moyen de faire cesser un péril imminent » (CE 7 mars 1913, Lhuillier), notamment quand le bâtiment ou une partie du bâtiment menace ruine, le maire doit justifier ce péril imminent et la démolition ne doit être ordonnée que s’il n’existe aucune autre solution pour faire cesser le danger.

V. L’entretien et la restauration des édifices du culte et leur financement

13. Qui doit entreprendre les travaux d’entretien et de réparation sur les édifices du culte ?

Si l’édifice du culte appartient à une personne publique

L’article 13 de la loi du 9 décembre 1905 dispose que :

« Les établissements publics du culte, puis les associations bénéficiaires [en d’autres termes l’affectataire], seront tenus des réparations de toute nature, ainsi que des frais d’assurance et autres charges afférentes aux édifices et aux meubles les garnissant.

L’Etat, les départements, les communes et les établissements publics de coopération intercommunale pourront engager les dépenses nécessaires pour l’entretien et la conservation des édifices du culte dont la propriété leur est reconnue par la présente loi. »

La circulaire du 29 juillet 2011 rappelle que la commune est responsable des dommages causés par le mauvais entretien et l’absence de travaux (CE 1921 Monségur). La décision d’entreprendre les travaux ne constitue donc pas une obligation, mais tout dommage résultant de l’absence de travaux engage sa responsabilité. La commune, propriétaire, est en effet responsable du bâtiment et de son entretien.

Si l’édifice du culte appartient à une association cultuelle ou diocésaine

Selon la circulaire du 29 juillet 2011 relative aux édifices du culte, il est prévu que pour les édifices appartenant à une association cultuelle ou diocésaine, c’est cette dernière qui est tenue des réparations de toute nature, ainsi que des frais d’assurance et autres charges afférentes aux édifices et aux meubles les garnissant.

Néanmoins, depuis une loi de 1942, les collectivités publiques (Etat, département, communes) peuvent (attention ce n’est pas une obligation) participer aux frais de réparation c’est à dire les travaux nécessaires à la conservation de l’édifice (maintien hors d’eau, mise en sécurité de l’édifice, etc.).

14. Comment financer la restauration d’une église ?

Que l’église soit protégée au titre des monuments historiques ou non

Il est aussi possible de demander une subvention à la Fondation du Crédit Agricole – Pays de France par l’intermédiaire d’une Caisse régionale du Crédit agricole, cet établissement bancaire étant sensible à la sauvegarde du patrimoine architectural. A noter, toutefois, que chaque caisse régionale détermine sa politique en la matière.

L’hebdomadaire Pèlerin organise chaque année le concours Le grand prix Pèlerin du patrimoine qui a pour vocation d’encourager et d’aider à la restauration du patrimoine culturel et religieux français.

Si l’église est inscrite au titre des monuments historiques

Le maitre d’ouvrage peut bénéficier, en plus des aides énumérées ci-dessus, du soutien de l’Etat via la DRAC. En vertu de l’article L621-29 du Code du patrimoine, « L’autorité administrative est autorisée à subventionner dans la limite de 40 % de la dépense effective les travaux d’entretien et de réparation que nécessite la conservation des immeubles ou parties d’immeubles inscrits au titre des monuments historiques». En pratique, les subventions sont nettement inférieures voire absentes pour raison de manque de budget.

Le maitre d’ouvrage peut aussi contacter La Fondation de la Sauvegarde de l’Art français, premier mécène des églises en France. Ses subventions sont principalement accordées pour les travaux de gros œuvres sur des églises ou chapelles construites avant 1800, inscrites au titre des Monuments historiques.

A noter que La sauvegarde de l’Art français anime également chaque année l’opération Le plus grand musée de France qui avec le soutien des étudiants des Ecoles de sciences politiques, œuvre au sauvetage des œuvres d’art présentes dans les églises.

Si l’église est classée au titre des monuments historiques

Si l’église est classée, la loi ne fixe pas de taux maximum à la participation de l’État. Celle-ci est comprise dans une fourchette de 30 à 50%, exceptionnellement au-delà.