Nouveaux ravages du Feu

hôtel lambertÉdito du 11 juillet 2013

1972 : incendie de la cathédrale de Nantes
1994 : incendie du Parlement de Bretagne
2003 : incendie du château de Lunéville
2013 : incendie de l’Hôtel de Ville de La Rochelle….

Et cette semaine : incendie de l’Hôtel Lambert à la pointe de l’Île Saint-Louis à Paris.

Une occasion nouvelle de faire réapparaître dans l’inconscient collectif les grands incendies des Tuileries, du Château de Saint-Cloud… il est toujours un ciel qui rougeoie, un bout de ténèbres qui flamboie pour nous rappeler le désastre, l’impuissance de l’homme devant le feu et l’eau !

Et puis il y a l’après… le lendemain du feu. Certains pleurent devant la disparition de la beauté, du sublime. D’autres philosophent : « sic transit gloria mundi » répétait le moine chargé de brûler des étoupes devant le pape nouvellement élu pendant sa première grande procession, « ainsi disparaît la gloire du monde ». Il y a aussi les cyniques : « dans un incendie, entre un chat et un Rembrandt je sauverai le chat » disait Giacometti.

J’ai même rencontré il y a vingt ans, en Ecosse, un aristocrate qui vivait dans les écuries d’un château détruit par un incendie. Il me racontait que pendant que le feu ravageait l’édifice et que les domestiques tentaient de sortir les meubles du brasier, le lord et sa famille prenaient le thé sur la pelouse…

Je crois surtout qu’il y a l’après-demain : le moment de la mobilisation des personnes et des associations, la communion dans l’identité qui a failli disparaître, la recherche de fonds publics et privés, la mise en œuvre de tous les savoir-faire et de toutes les techniques pour restaurer le sublime.

Tant de gens s’étaient mis en mouvement pour que la restauration de l’Hôtel Lambert soit conforme aux normes de son époque. Espérons que les mêmes se mettront en marche pour accompagner ce qui doit désormais être accompli comme un devoir.

Pensons aussi à ces monuments, ces châteaux et ces églises un jour partiellement détruites qui, trop modestes, n’auront pas la chance d’avoir comme à Lunéville un archiduc pour présider l’association des amis ou comme à l’Hôtel Lambert l’émir du Qatar comme bailleur de fonds.

Tous, grands ou petits édifices protégés par les lois de ce pays, réveillent dans le cœur de nos concitoyens cette vague mémorielle caractérisant pour eux le Patrimoine, conclusion du sondage réalisé par les Vieilles Maisons Françaises à l’occasion d’un récent colloque à l’UNESCO1.

Alain de la Bretesche
Président-délégué de la Fédération Patrimoine-Environnement
Président de la COFAC (Coordination des Fédérations des Associations de Culture et de Communication)
Administrateur de la Conférence CPCA (Conférence Permanente des Coordinations Associatives)
Administrateur d’Europa Nostra

Retrouvez le compte-rendu du colloque des VMF « Un siècle de protection des Monuments Historiques, pour quel avenir ? »